Bon. N’y allons pas par 4 chemins, En attendant Dodo, dernier spectacle jeunesse du sieur Grondin, c’était très bien. Dans Zanaar, estampillé spectacle pour adolescents mais pas seulement, on retrouve les ingrédients qui font le succès de la compagnie Karanbolaz : montages vidéos dynamités, jeu d’acteur ultra rythmé, sujet d’actualité. Trois gamins livrés à eux-mêmes doivent survivre à l’effondrement politique, climatique, écologique. Manzi l’a vu mais refuse de m’en causer. Raison de plus pour y aller.

Cécile Hoareau est une auteure exigeante, tant dans ses choix d’écriture que dans sa direction d’acteurs. Elle accompagne ses créations d’un travail de recherche approfondi, ce qui est un gage de qualité. C’est vrai, le dernier spectacle que j’avais vu de la compagnie Nektar, : “désarmés, le Gran kantik” était ardu. Inspiré du mythique texte biblique, il avait cela dit été interprété intensément par Ann Oaro.

Si ce denier opus t’a semblé hermétique, rassure-toi, Cécile Hoarau amorce avec 20000 millimètres sous terre un tournant dramaturgique. Trois comédiens dont notre incontournable David Erudel. Déjà.

Un pitch à la problématique efficace : une entreprise de travaux publics échappe à la faillite en construisant une route qui doit traverser un camp de migrants. Je te laisse imaginer les problématiques pour ne pas offenser ton sens critique. Bref, un virage contemporain pour une pièce d’actualité à découvrir sans hésiter.

D’abord, c’est toujours un plaisir de revenir au Théâtre sous les arbres, ce lieu artistique atypique immergé dans la chaleur portoise. Outre le fait que Teat Lakour soit presque une institution à la Réunion j’irai voir avec joie le comédien Eric Isana. Il m’a beaucoup émue récemment dans son rôle de père divorcé qui traverse l’île en stop pour ramener un doudou à sa gosse. Ça c’était à la soirée du court Yabette de Champ Fleuri, et ce court métrage de Laurent Pantaléon s’appelait : “Le retour”.

Dans Madiba Zennani, on le retrouvera sur le lino du plateau pour aborder un sujet costaud :

Madiba, c’est Mandela. Zennani son arrière petite fille. Jocelyne Lavielle les convoque pour un face à face post mortem. Les enjeux : confronter les générations pour une discussion engagée autour de l’héritage de l’Apartheid.

J’imagine ce duo porteur, j’irai donc sans peur.

Attention, trois dates à ne pas manquer pour ce spectacle de théâtre d’objets, alliant marionnettes, robots et artistes marionnettistes. J’ai eu la chance d’assister à la générale et j’ai adoré ce spectacle poétique traitant avec humour, sensibilité et surtout ingéniosité de la question du handicap, du regard de l’autre et de la différence. Fans de mécanos, de domotique et de bidouillages en tous genres, emmenez vos gosses voir ce spectacle en or.

Coup de coeur aussi pour la personnalité d’Yvan Pommet, papa de cette création qui sous ses airs de savant fou roi de l’électronique a réussi avec son Deus ex machina à faire couler des larmes d’émoi dans notre public d’adultes vaccinés. Si tu rates ça, je ne peux plus rien pour toi.

À voir également le jeudi 5 et le vendredi 6 mars à 19 heures à la Cité des arts.

Compte tenu du fait que mon vocabulaire musical est aussi étendu que mes connaissances en électro, je vais te la faire courte. Tout le monde parle de Labelle, ce virtuose réunionnais qui a tout de même enregistré un premier album symphonique mêlant musique classique et électro, en gérant sa com avec brio. “Éclat” me tente pour deux raisons. D’abord je pourrais enfin soutenir une conversation musicale avec Manzi qui ne jure que par le rock décati, ensuite la perspective du quatuor à cordes, même revisité à la sauce rock électro, me rassure. Quand la musique contemporaine intègre les instruments lontan, j’ai espoir de passer un bon moment.

Ils sont trois sur scène, pour explorer le souvenir d’un mythe : celui de Barbara, la chanteuse, l’artiste engagée, la fascinante ensorceleuse de l’Aigle Noir. De cette création, les spectateurs disent qu’elle est bouleversante, polymorphe, pleine d’émotion et juste.

C’est déjà beaucoup. La chanteuse Raphaëlle Lannadère, le pianiste Babx et Thomas Jolly en personne conjuguent donc leurs talents pour ce pêle-mêle d’esthètes. Comme la critique nationale s’accorde à dire que Thomas Jolly, directeur du Centre Dramatique National d’Angers signe avec ce récit un bijou de sensibilité et d’intelligence, Bongou a très envie d’entrer dans la danse.

À voir également au Théâtre Luc Donat le samedi 22 février

Comme tu le sais sans doute, le nom de Möbius est souvent associé à un anneau, ou ruban sans fin n’ayant ni intérieur ni extérieur. Ça tombe bien car c’est aussi le nom du dernier spectacle de la compagnie XY, qui a eu l’idée de bâtir une chorégraphie autour du thème des murmurations animales, c’est à dire l’évolution de ces millions d’oiseaux ou de poissons qui se meuvent ensemble sans entrer en collision.

Au delà de l’esthétique géométrique, cette création dans laquelle se rejoignent danse, acrobaties et théâtre cherche à explorer le vivre ensemble. Sans décor ni accessoire à l’exception de leur baudrier, 19 acrobates spécialisés dans les portés vont évoluer dans cette nuée. C’est un temps fort du cirque contemporain et ça a l’air très bien.

Si tu connais un peu les frères Jacques et leurs frasques musicales dans les années 1980, tu aimeras sans doute passer ta soirée en compagnie des Fouteurs de joie, groupe iconoclaste où guitare acoustique, trompette et accordéon étoffent un concert théâtralisé insolent à souhait. S’ils ont pas mal arpenté les ruelles d’Avignon, je les découvrirai avec plaisir à La Réunion, pour un moment artistique sans prétention mais non sans réflexion. En prime, ces gaillards à la bouille sympathique ont l’air charismatiques. À mon humble avis, une chouette découverte. 

Après avoir regardé le teaser, je me sens très attirée par cette création 2018 de la compagnie Dyptik. D’abord, l’univers sonore de Patrick de Oliveira nous plonge dans une atmosphère de thriller. Les influences du hip hop et des arts martiaux amènent les interprètes à raconter une histoire qui du coup, semble assez concrète : une menace plane et les corps tentent d’y échapper. Ça a l’air aussi angoissant que captivant donc très motivant. En avant.

Si tu es un féru de danse classique, cette soirée est faite pour toi. 32 interprètes issus d’une école chinoise prestigieuse, 9 mouvements qui reprennent des extraits de  ballets phare tels que Le Lac des Cygnes ou le Quichotte, une heure trente de ravissement. Il n’est pas rare à La Réunion de voir des pointures, mais des ballets entièrement sur pointes, si. Cette discipline ardue offre tant de beauté que même les néophytes seront subjugués.

Quand Onfray entre dans une assemblée, il se produit un phénomène curieux. Les femmes sont en émoi, les hommes ne bronchent pas. Qu’on lui voue un culte ou pas, le bonhomme a un charisme qui ne se discute pas. Oui je l’avoue, je suis une fan absolue du gourou Michel Onfray, qui m’a sauvée de moult péripéties lorsque j’enseignais la philosophie en Australie. Si j’ai titillé ta curiosité, clique ici, et tu verras que je ne pipeaute pas. Outre la générosité du bonhomme et son érudition, c’est un véritable bonheur de l’entendre expliquer avec autant de clarté des idées compliquées. Que tu aies lu Cosmos ou pas, je peux t’assurer que tu passeras un moment captivant à l’écouter parler de ce bouquin élu par le prix Lire “meilleur livre de philosophie de l’année”. S’il m’a donné envie de boire du vin, il a aussi remis de l’unité dans le chaos de nos données. Oui, nous les êtres sur-connectés, nous ne sommes plus foutus de nous recentrer. Cosmos aide à comprendre le monde hors du prisme de la morale et de la religion. C’est plein d’exemples concrets et Onfray vient à Donat pour en causer. Je te jure sur tous les dieux qui n’existent pas qu’une conférence d’Onfray ne s’oublie pas.

Quand j’ai dit que je n’irais pas voir ce spectacle ; l’idée d’une bande d’ados gesticulant sur de la techno m’ayant d’emblée assommée, j’ai reçu les foudres de tous les érudits de la chorégraphie. On m’a expliqué que j’allais rater un trio de héros. Que ces rebelles débridés cassaient l’internet. On m’a vendu des fous furieux iconoclastes, des Greta Thunberg de la danse contemporaine. Des radicaux du bitume. Donc j’irai voir (La) Horde histoire de savoir si nos avis concordent.

J’aime beaucoup l’idée que ce quatuor va danser sur le dernier texte théâtral de Jean Genêt. Le Funambule, œuvre écrite pour son jeune amant Abdallah Bentaga, à l’origine garçon de piste dans un cirque, pose un acte amoureux.  Il s’ensuivit 7 ans plus tard un double drame : avec son suicide, Abdallah mit fin à la carrière dramaturgique de Genêt. Le funambule a déjà été dansé par le maitre Preljocaj en 2009. Je suis donc curieuse de savoir comment la compagnie Bertha aura réinventé ce tragique ballet. 

BONGOU SOUS LE CHARME

ZERBINETTE : “Tine Poppy maitrise à fond les codes de l’autodérision. Elle exploite avec intelligence son statut de nobody propulsée dans la sphère Paradis. Livre avec candeur sa stupeur de fille de planteur d’ananas qui n’en revient pas d’être là. À ceci prés que son talent scénique, vocal et musical dément toute usurpation. Ce soir, Poppy nous a bluffés”

MANZI: “Son spectacle n’est pas un énième tour de chant revisité mais un vrai cabaret qui nous fait plonger dans son intimité avec beaucoup de sincérité. Essayer de divertir en racontant les déboires de sa vie est un pari risqué car il peut vite sombrer dans une narration autocentrée et mille fois exposée. La séga-thérapie proposée par cette artiste alterne autodérision et jouissives railleries, notamment sur le monde dégoulinant du coaching en psychologie positive.”

J’ai longtemps cherché la contrepèterie dans le titre de ce spectacle avant de me résigner. Hocus Pocus est tout simplement une formule magique, en rapport avec les effets visuels présents dans cette proposition de danse contemporaine. Artistiquement, ça a l’air alléchant, parce qu’étrange, poétique, mystérieux. J’aime assez le mélange qu’on nous promet, entre la danse, les jeux d’ombre et les effets 3D. En plus, les petits vont parait-il adorer.  45 minutes de cohésion familiale autour d’un spectacle intelligent, c’est pas abracadabrant. En avant !

Si Yoann Bourgeois donne le départ du Total Danse, c’est sans doute parce que ses deux pièces sont à la frontière de plusieurs arts. Fugue/Trampoline, l’histoire faussement légère, d’un homme qui ne cesse de s’envoyer en l’air offre « une rêverie en suspension ».  Gravir, rebondir et chuter. Les trois piliers de l’humaine condition. Bref, au delà des prouesses, un moment de réflexion. Comme ce spectacle gratuit est à voir en famille sur le parvis de Champ Fleuri, j’espère que tu es ravi.

La soirée se poursuit avec « Celui qui tombe ». J’avais déjà eu la chance de voir les danseurs de Soraya Thomas s’essayer au plan incliné, dans Head Rush. La contrainte imposée par ce décor convoque la densité et ce spectacle m’avait bluffée. Ici, s’ajoute à la difficulté de l’inclinaison, celle la rotation. Entre cirque et théâtre, les interprètes de ce spectacle proposent d’illustrer une métaphore : celle de « l’étourdissement des hommes par la vitesse du monde ». De quoi ralentir enfin la course de secondes.

Photos © DR

Je n’ai vu qu’un seul tableau du jeune artiste réunionnais Abel Techer. Que je n’ai à ce jour pas oublié. Sur un fauteuil de rotin rose, un être fascinant, à la frontière des genres, prend la pause. Voluptueux, troublant, insolent. Sans doute parce que la grande maîtrise technique, accentuant l’illusion de réel joue sur le registre de la transgression. Du bleu et du rose mais de la nudité ; de l’érotisme sans cliché. Un autoportrait. Lequel donne fichtrement envie de découvrir le reste des oeuvres du plasticien sur le travestissement.  Ça tombe bien, cette expo, en partenariat avec le FRAC RÉUNION est ouverte pendant trois semaines. Savoure cette aubaine. 

Les soirées d’Halloween se succèdent et se ressemblent toutes, et cette commercialisation bidon me file le bourdon. Heureusement, Lucie le Renard et Alexis Campos te donnent un rendez-vous beaucoup plus classos. Fuis la chasse aux bombecs, et rejoins-les sur le parking du CDNOI, où ils joueront le texte phare de Patrick Kermann : La mastication des morts. 24 comédiens, parmi lesquels des amateurs et des figurants, feront entendre les voix d’outre-tombe, pour une fresque polyphonique pas un poil tragique. Campos pique au théâtre de rue des mises en scène souvent couillues, je m’attends donc à un moment farfelu. 

J’ai beau chercher, je ne sais toujours pas ce qu’est GONFLE, le premier objet théâtral de Camille Touzé. Du cirque ? Du mime? Du théâtre d’objets ? Je me garderai bien de trancher. Ce que je sais, c’est que cet esthète amoureux de poésie et de sérigraphies est un perfectionniste touche à tout. Non sans culot, il nous annonce un spectacle élastique. Ça a l’air franchement marrant, léger sans être niais. Et familial sans être banal. Peut-être un régal.

©photo: Enilorac Photography

On doit à Françoise Dô un des textes d’Intérieurs, la dernière création de Luc Rosello pour le CDNOI. La collaboration avec cette dramaturge martiniquaise se poursuit, puisqu’elle vient présenter À parté, dans le cadre du festival Mouvman téat. Voilà ce qu’elle dit de sa pièce : 

« Plusieurs thèmes sont abordés. Le principal est celui de la solitude.La solitude découlant de la séparation impossible d’êtres qui s’aiment : une femme et un homme, un fils et sa mère, une mère et son enfant. Je me propose de mettre en scène ce texte dans un espace sobre où la lumière impose la rêverie face à une réalité trop crue. » Moi je te propose d’y aller, pour te faire une idée. 

Parfois, on a juste envie de rigoler. En plus, le stand up est un art en pleine ébullition, les mauvaises langues disent d’ailleurs qu’il n’y a plus que ça à Avignon. Le CV de Bentalha, trente ans on croirait pas, fera baisser les yeux aux envieux : Jamel Comedy Club, premières parties de Jamel et Gad Elmaleh, puis premier coup d’essai. Encore est son deuxième « One man show ». 4 Olympia à guichets fermés. Un vrai succès. Là où il y a du fumigène, il prend du plaisir. Noté 4/5 par Le Parisien, c’est pas rien.  Comme le gars passe à Luc Donat, bien sûr toi tu y vas.

C’est toujours pareil quand j’écoute du Fontano. Sa plume me met K.O. Si tu n’as pas encore vu Loin des hommes, ressaisis-toi presto. Comme l’auteur a le tragique dans la peau, le sujet n’est évidemment pas rigolo. C’est l’histoire d’un homme que l’on n’a pas aimé, qui pense renaitre en découvrant l’homosexualité. Il croise une femme dont le passé est violence. Loin des hommes superpose les monologues fracassants, portés par des acteurs puissants. Accessoirement, Fontano est le premier réunionnais à avoir été lauréat  2019 du prix du Tarmac avec cette pièce. Une raison de plus de te bouger les fesses. 

“Pour tenter de comprendre ce qui fait qu'on se pense réunionnais, lorsque la langue de bec se sent abandonnée, Sergio Grondin convoque le maloya. Merveilleuse métaphore de l'identité créole, qu'il suffirait d'interroger. Au passage, c'est souvent drôle. Quand Grondin prête sa voix aux piliers de la créolité, la parodie est musclée. Côté signature sonore, Kwalud ne verse pas dans la facilité. Que les inconditionnels du traditionnel passent leur chemin, cette musique-là ne leur dira rien. Et pour cause. Maloya résiste à l'épreuve du « je ». Grondin a beau convoquer tous ses dalons, le Maloya repousse l'unicité d'une définition. Le conteur est forcé de  multiplier les questions. Qui a raison ? La création se refuse à toute affirmation. Que c'est bon.” Zerbinette

J’ai toujours entendu beaucoup de bien du travail réalisé par la compagnie Théâtrenfance, spécialisée entre autres dans le théâtre d’objets. Mais je n’avais jusqu’alors jamais eu la chance d’assister à une de leurs représentations. Fort heureusement, les gramouns Minouche et Minouche, reviennent au théâtre sous les arbres. Pas pour nous agonir de palabres, mais bien pour nous faire marrer. Ces deux-là perdent un peu la boule, et leur retour dans le passé, via une foultitude d’objets désuets promet. C’est un spectacle pour les tout petits mais les autres peuvent venir aussi. À mon avis, ce sera très réussi.

« Le départ c’est la rencontre improbable de deux personnes, l’une trop riche, l’autre trop pauvre, qui émigrent vers un ailleurs », nous apprend le CDNOI, pour présenter cette comédie, portée par deux auteurs guyanais. Et ça se passe à Calais. Notons que la pièce fait partie de la sélection Mouvman Téat, ce festival lancé par Luc Rosello depuis maintenant 4 ans, et qui met à l’honneur les créations locales et celles de l’Ailleurs. Comme je ne sais fichtrement rien de cette compagnie Strapontine, je vais découvrir comme toi, si dans la myriade des spectacles sur l’immigration, celui-là retient mon attention. 

Je pourrais te dire que j’ai le même âge qu’elle, que j’ai grandi avec Joe le taxi et divorcé en même temps qu’elle. Je pourrais te dire que la grâce et la classe avec laquelle ce bout de femme traverse la vie, m’inspire et me fortifie. Que j’admire toutes les facettes de l’artiste, de la chanteuse à la modeuse, la comédienne comme la musicienne. Mais j’aime surtout l’idée que cette femme jamais n’a plié. A concilié avec humilité force de caractère et féminité. Donc oui, j’irai puiser aux Sources les forces vives que toujours elle ravive.

©photo: Mathieu Zazzo

À voir également le mercredi 16 et jeudi 17 octobre au Téat Plein Air

D’abord, j’ai jusqu’à présent toujours été séduite par le travail d’Isabelle Martinez, qu’il s’agisse de la voir enterrée sur scène dans Oh les beaux jours, ou d’échanger avec elle sur la générosité de Beckett, l’homme qui écrivait que « Le plus grand tort qu’on a, c’est d’adresser la parole aux autres. »

Petites conspirations a l’air d’un mille-feuille tendre amer. Écrit et cuisiné par la dame, il alterne monologues et duos d’âmes. Comme tu t’en doutes, ses personnages, contemporains, se frottent à leurs névroses. Donc aux nôtres. Comme Martinez est téméraire, elle intègre à son équipe des amateurs. Dont les inénarrables Filip Auchère, Sandrine Ebrard et Robin Frédéric. J’ai hâte de voir leurs truculentes trombines sortir de la zone de confort. Et hâte de découvrir ces énergies nouvelles. Oui, j’attends l’étincelle. 

Tu n’aimes pas les rencontres langue de bois? Bienvenue sur le ring du salon du livre Athéna. On va y causer théâtre et insularité. À ta droite, le dramaturge mahorais Ambass Ridjali. Hypocrisies du colonialisme et dysfonctionnements de la départementalisation à Mayotte sont ses marottes. À ta gauche, l’auteur, comédien et metteur en scène Daniel Léocadie. Son Kisa mi lé explorait avec poésie les facettes de l’identité réunionnaise lorsque le corps s’exporte et que la langue éclate. Pour arbitrer cette rencontre, ton humble Zerbinette. Comment dire l’insularité dans le théâtre contemporain? Léocadie et Ridjali s’y collent. Y a-t-il encore une vraie liberté de parole dans le théâtre subventionné, comment jouer les blessures et le passé sans diviser ? Tu l’as compris, la médiathèque de Saint-Pierre te convie à un moment de vérité. Tiens-toi prêt. 

Il était une fois deux étalons qui allaient prendre l’avion pour venir danser à La Réunion. Je tiens de source obscure mais sûre que leurs propriétaires refusant de les droguer dans les airs, voyageront avec eux. Contre eux. L’anecdote en dit beaucoup sur le degré d’implication de Camille et Manolo auprès de leurs chevaux. Centaures est l’histoire une fusion où l’homme et l’animal accèdent à une divinité fantasmée. Du cirque poétique complètement insolite. Du rêve made in Genève, servi sur le plateau de Champ Fleuri. Je suis déjà ravie.

©photo: Martin Dutasta

Il était une fois une île imaginaire en forme d’oeuf. Il était une fois des personnages : Ravine, Efferalgan, la Dame du petit trou, la Mare à poule d’eau, la Buse le pirate, un carré de sucre. Toute ressemblance avec des personnes ayant réellement existé à La Réunion serait un fantasme de votre part. Ils attendent dans une gare routière qui doit les mener au terminus de leur quête. Des ravines, la dernière création de Lolita Monga, est un chant pour une île qui n’existe pas.

Je ne vais pas te mentir, à première vue, on ne sait pas bien ousanousava avec cette histoire-là. Mais Lolita Monga a confié la mise en scène à Laurent Fréchuret, directeur du Théâtre de l’Incendie, déjà venu au CDOI présenter : En attendant Godot, qui a l’époque croula sous les bravos. Ces deux briscards de la dramaturgie sont capables d’alchimie. 

Banco ou fiasco?  J’irai voir ce duo.