J'étais pleine d'espoir en allant voir Gran Consiglio. La pièce avait reçu le prix de la plus belle performance d'un seul en scène au OFF d'Avignon en 2017, et elle nous était ramenée par Alain Courbis, l'homme qui fait revivre LESPAS pour notre plus grand bonheur depuis deux ans. Pourtant, je me suis ennuyée fermement. Voici pourquoi, ouvertement.
L'idée de base est salutaire. Tom Corradini, acteur, metteur en scène et auteur du spectacle a voulu dresser un portrait du parcours hors norme de Mussolini, ex chef suprême de l'Italie. Pour mettre l'accent sur les rouages de la manipulation, dans un dessein noblement pédagogique, il retrace pendant plus d'une heure les moments clefs de la vie du Duce, sensés nous éclairer sur la construction de cette personnalité hors-norme.
Soit.
Dans les faits, Corradini singe un Mussolini ballot. Qui s'empiffre de bananes à grands renforts de bruitages, bouffe ses crottes de nez, et boit du lait.
L'acteur – qui doit être un fervent admirateur de Louis de Funès – nous campe un Mussolini aux allures de gendarme à Saint-Tropez, le talent en moins. C'est horripilant. Sans jamais jouer des distorsions entre signifiant et signifié, il nous accule au ridicule : mimant le geste de tirer, il l'accompagne du bruit du fusil. S'escrimant à nous proposer des gesticulations dont on ne comprend ni l'utilité ni le rapport avec le Duce, il nous agace, et très vite nous lasse.
La mise en scène surannée relève des mêmes effets. Le fauteuil sert à s'asseoir, le portrait de la Mama à être embrassé et le violon à jouer. Hitler est une marionnette et les métaphores sont aux oubliettes. Un plateau nu eut finalement mieux convenu.
Mais le plus gênant n'est pas là. En réduisant un des plus grands manipulateurs de l'Histoire à un rôle de Pantalon de commedia dell'arte, Corradini ôte au personnage sa dangerosité. Les idioties réitérées de ce Mussolini nous le rendent presque sympathique, parce qu'on a pitié de sa bêtise. Or c'est justement par son intelligence et son charisme que le dictateur a sévi. En cela, la cause de la pièce est bien mal servie.
Zerbinette