IOMMA = 4 x 30 minutes de concert + 4 x 30 minutes de lien social (comprendre « palabrer autour d’une bière ») sur 4 jours. Cette équation basique résume mon parcours de remise en forme, grisant mélange de sonorités et de ladilafé destinés à préparer le week-end festivalier.
Si le IOMMA fut l’occasion de me confronter à des sons de tous les horizons et d’effectuer une mise à jour des groupes locaux, j’y ai surtout perdu mes dernières onces d’ingénuité dans le brouhaha de cette féroce armada. Extraits d’avis plus ou moins vécus (à vous de compléter ce texte à trous) :
- T’en penses quoi du groupe ……………….. Manzi, dit Le Magnanime ?
Manzi : Oh tu sais moi, comme d’habitude, je trouve ça formidaaaaable. J’adore leur univers métissé, l’évocation tout en finesse de leur rapport à l’insularité avec ces lyrics engagés magnifiés par une fusion délicate de rengaines australo-européennes et de percussions indo-africaines.
Mme W (diffuseuse du groupe) : Carrément, j’ai tellement de retours bouleversants qui vont dans le sens de ton ressenti si joliment dit. Quand est-ce que tu l’écris dans ton blog de béni-oui-oui ?
M. X (chargé de production de festivals) : Ah ouais, t’as kiffé ? Bin moi, c’est la pire prod’ que j’ai jamais eu au………………………. Plus jamais je veux les recevoir !
Mme Y (programmatrice) : T’es gentil Manzi mais t’as vu ce son pourri… Quand est-ce qu’elle va se trouver un vrai sondier? (sondier = le mec qui fait le son en live).
M. Z (directeur de salle) : Y’a intérêt qu’il ait progressé vu l’aspirateur à subventions que c’est devenu.
Connu pour ma candeur et mon combat contre l’aigreur, vous aurez compris que je suis enchanté de n’être qu’un spectateur butineur qui survole cette industrie du show bizzz. Ce qui est certain c’est que toutes ces rencontres se font dans la bonne humeur et il est exaltant de voir cette ruche en ébullition. S’il m’est impossible de faire un retour complet de tous les concerts visionnés, j’ai pu constater que le temps du folklore musical réunionnais plan-plan était révolu et que la plupart de nos groupes propose de vrais univers sophistiqués, alliant l’authenticité du passé et une quête d’originalité en toute contemporanéité. Sauf un. Mais va falloir lire jusqu’au bout…
LUNDI 30 MAI : La surprise Saodaj !
Saodaj trimballe sa réputation de groupe folk-maloya-nomade qu’on associe un peu trop vite à son public néo-hippie, les fameux toukoutoune de Saint Leu. L’esthétique des premiers temps avait entamé ma curiosité et j’avais suivi uniquement la sortie de leurs clips, franchement chiadés et aux compositions de plus en plus élaborées. Ce que j’ai vu au IOMMA m’a franchement enthousiasmé. Non, Saodaj c’est pas ZAZ et leur mojo flirte avec celui des Lo’jo. Si la base de maloya est toujours revendiquée, la tribu s’est étoffée et l’apport des nouveaux musiciens emporte leur musique vers des horizons moins étiquetés, plus raffinés en affirmant une vraie identité. Le virage de la maturité.
MARDI 31 MAI : Kombo gagnant ?
Ce trio est composé de trois grands pros et propose d’exigeantes compos : Mélanie Bourire au chant et aux percussions rayonne, Lise Van Dooren aux claviers transcende les mélopées et le magistral Franck Paco à la batterie tape aussi bien qu’il se sape. Sans être musicien, on se rend vite compte de la virtuosité des artistes, de la richesse des morceaux, de la multiplicité des références et du plaisir qu’ils ont à concorder. Malheureusement, face à l’enchaînement de tous ces combos, en tant que jazzeux néophyte, très vite ça tilte. Je n’arrive pas à savoir si je suis trop ou pas assez cérébral pour apprivoiser ce multi-balles.
MERCREDI 1er JUIN : Mouvman Alé, di partou
Je vais arrêter de vous vanter Mouvman Alé car on va finir par croire que j’ai des parts dans ce jeune projet. Depuis 13 ans que je vis à La Réunion, c’est un peu MA révélation scénique tant les gars sont authentiques et savamment bordéliques. L’âme rock du quatuor y est pour beaucoup et leur syncrétisme musical est aussi planant qu’excitant. L’énergie déployée par le leader Franswa est tellement stroboscopique que, si nos jambes frétillent, notre cerveau sidéré ne parvient à extérioriser qu’une bouche bée.
JEUDI 2 JUIN : L’Oiseau Noir cherche sa plume
L’Oiseau Noir, sur sa scène dépouillée
Jabotait son trivial verbiage
Maître Manzi, n’ayant crainte du tollé
Lui tint à peu près ce langage :
Et bonjour, Monsieur L’Oiseau.
Que vos textes sont décatis ! C’est quoi ce flow !
Sans mentir, si votre lyrisme
Se rapporte à votre égocentrisme
Vous sonnez creux comme la Phénix que je bois
À cet affront gratuit, L’Oiseau part au combat
Et pour montrer sa belle voix
Il enchaîne deux rimes, laisse s’échapper un renvoi
Manzi l’esquive et dit : Mon bon Monsieur
Apprenez que les flatteurs
Sont légion mais qu’un public vous écoute.
Cette leçon ne vaut guère mieux qu’un rot, sans doute.
L’Oiseau honteux et belliqueux
Jura, pour plus tard, qu’il allait faire mieux.