En ce moment, on a besoin de rire. Et ça tombe bien parce que Bongou t’a dégoté la super création de l’année, un feel good ovni théatro-musical tout droit sorti du cerveau sarcastique de Sergio Grondin sous le regard artistique de Daniel Léocadie. Ça cause de reconstruire le monde après le tu-sais-quoi sans plus jamais sortir de la Réunion, c’est intelligent, hilarant, et Bongou te donne 5 excellentes raisons de t’y ruer en famille.
1. C’est pas tous les jours que je vois Vincent Fontano s’esclaffer sous son masque au théâtre. Et croyez-moi, il n’était pas le seul : les rires ont fusé toutes les 10 minutes tant cette fable apocalyptique est, contre toute attente, un festival de runing gags et punchlines (merci à la plume d’un Sergio Grondin au sommet de l’acidité), et à une écriture au plateau qui a fait la part belle aux délires verbaux de chacun. Quant à Daniel Léocadie, pas en reste dans le domaine non exhaustif de la vanne en finesse, son regard artistique a largement contribué à équilibrer la fusée. Évidemment, le public est sollicité pour ces moments d’hilarité ce qui ajoute au dynamisme du projet. Le comique de geste est lui aussi grandement exploité par les phénomènes que sont Alexis Campos, Pierre Armand Mallet et Eric Lauret dont on connaît le potentiel farcesque, ici démultiplié.
2. Certes, le sujet traité n’est pas joyeux, puisqu’on nous parle tout de même de confinement obligatoire et éternel dans le lieu dit de Mahavel, Réunion, suite au tu-sais-quoi. Mais le tandem Grondin / Léocadie échappe à l’écueil alarmiste et moralisateur. Au lieu de ça, on retrouve la cacophonie humaine incarnée par 5 personnages stéréotypés mais non simplistes, soumis au défi de refonder la communauté. Et de survivre. Le mélange de personnalités opposées, miroir du public, rend les échanges jubilatoires.
3. Causons un peu de la performance d’acteurs, avec le gratin de la jeunesse réunionnaise en pleine effervescence. Campos est au sommet de son art en zorey aussi péremptoire qu’attachant par sa psychorigidité, Fany Turpin nous régale en folle tisaneuse du Grand Brûlé, Lola Bonnecarrère, docteur en médecine et féministe hystérique vaut son pesant d’ovaires, Pierre Armand Mallet en ravi de la crèche offre un parfait équilibre entre comique de répétition et poésie, sans oublier notre Eric Lauret, roi de la blague et du mime, dont les vaticinations sonores relancent sans cesse une machine déjà à pleine vitesse.
4. Mahavel est un spectacle pour tous, à partir de 10 ans. Non seulement parce que tu l’auras compris, c’est drôle et que le thème de la survie humaine est traité de manière accessible, mais aussi parce que, pour revenir aux bonnes bases de la commedia dell’arte, c’est un spectacle total qui conjugue chant, poésie, joutes verbales, danses, musique (merci Eric Lauret au guitarlélé, et à Alexis Campos au mélodica, pour ces intermèdes facétieux et rafraîchissants)
5. Chers programmateurs, et cher public d’ici et d’ailleurs, vous l’aurez compris, Mahavel est le coup de cœur Bongou de ce début d’année. En plus, il est facile à transporter. Côté scéno, c’est précis efficace, quelques loupiotes parfaites pour cette ambiance post apocalyptique, deux trois objets symboliques sur scène et le tour est joué, vous avez une œuvre de qualité prête à emporter. Atemporelle, universelle, vive Mahavel.