Profitant de l'entracte, Manzi détracte un monument de danse contact et jacte comme un con sans tact.
All Ways de la Compania Sharon Fridman fait partie de ces propositions d'où l'on ressort sans grande satisfaction ni énorme déception. Le genre de soirée que je n'ai pas détestée, que je ne vais clairement pas encenser mais que mon statut de pigiste grassement rémunéré m'impose de critiquer, en toute subjectivité. Si le duo d'entrée ¿Hasta dónde...? m'a emporté par sa simplicité, sa fragilité et sa légèreté ; la deuxième partie m'a plutôt plombé. J'avoue ne pas avoir étudié le fascicule de présentation et je suis parti dans une drôle d'interprétation de ces corps en rotation. Tout le spectacle, j'ai cru entrevoir un tourbillon d'âmes en errance, survivant dans un monde étouffant sous un smog de gaz carbonique. Le hic dans ma symbolique c'est que je suis légèrement antagonique avec ce « parcours d'un groupe habité par un rêve d'harmonie, et qui doucement s'élève vers les sommets ». Si j'ai bien compris que cette danse n'était pas là pour m'expliquer les tenants et les aboutissants du conflit syrien ou les principes fondamentaux de la fusion nucléaire, mon ressenti complètement hors sujet m'a déboussolé et finalement lassé. Jamais les collés-serrés des sept danseurs n'ont désamorcé ma sinistrose écologique de rentrée (démission de Hulot, l'Île Maurice qui s'apprête à signer un accord de pêche avec le Japon, avis favorable pour la carrière de Bois Blanc). Une sensation de répétition m'a gagné par l'abus de ces rondes marchées ou trottées. Ces masses mouvantes obsédées par cette contrainte du corps à corps m'ont autant fait penser à une partie de Twister sur tapis invisible qu'à un radeau de méduses un peu trop collantes et déprimantes. Autant dire que j'étais bien loin de « l'inépuisable utopie d'un monde solidaire, d'une quête d'harmonie qui ne connaît jamais de fin ».
Toutefois, j'admets avoir été hypnotisé par cet instant suspendu avec les corps nus et le faisceau lumineux irradiant, même si le tableau s'étire longuement. De même, les portés et autres sauts athlétiques restent d'un dynamisme haletant qui s'apparente à l'énergie communicative des déséquilibres circassiens.
Au final, si je fais le parallèle entre une relation sentimentale et cette pièce dansée, je dirai que j'aurais pu succomber même sans tout éprouver. Or, ma légendaire superficialité a également bloqué sur les tenues débraillées et un accompagnement sonore sans originalité. Dorénavant, je me fierai aux apparences et vous prouverai que mon appétence pour le programme de Total Danse demeure intense.
Manzi