23 mises en scène à son actif de 97 à 2012. Record national de la pièce la plus longue avec La servante qui dure 24 heures. Écrivain depuis l'âge de 17 ans, acteur, infatigable novateur et brillant orateur. Dans deux minutes, j'interroge Olivier Py, directeur du festival d'Avignon. Et Bongou monte au front.
Après avoir fourni mes empreintes vocales et digitales, échangé une myriade de mails avec son assistante, donné les références du journal encore dans les langes, la nouvelle est tombée. J'ai 15 minutes pour interroger Olivier Py sur Le cahier noir, son oeuvre intime écrite à 17 ans, publiée sous forme de court roman chez Actes Sud 35 ans plus tard, adaptée à la scène par l'auteur en personne en 2016 et jouée à Champ Fleuri ce vendredi.
Lorsque j'explique à Py que j'arrive après la bataille, toutes les questions brillantes lui ayant déjà été posées l'année dernière par Télérama, Le Figaro et autres brûlots, il me fait cette réponse délicieuse : ” Ah vraiment ? Eh bien dans ce cas je ne l'ai pas remarqué.“
Grosse ambiance derrière mon iPhone, mais à l'impossible, j'étais tenue. En effet, “Interviewer Olivier Py et mourir” est l'épitaphe parfaite pour une chroniqueuse de bon goût. Je me suis donc lancée, tétanisée.
Comment fait-on, Olivier Py, pour assumer de tels écrits de jeunesse? ( et d'ajouter, histoire de m'enfoncer. . . ) Car enfin, il faut une sacrée paire de couilles pour publier autant d'intimité . . .
D'abord, il ne s'agit pas de mon journal intime. Il s'agit d'un court roman, qui a la forme d'une fiction. J'ai mis 35 ans à le publier, j'imagine qu'une distance suffisante s'est installée, face à quelqu'un qui n'est plus moi.
Du Cahier noir, on dit qu'il exprime un mal-être juvénile, une volonté d'être maltraité, de souffrir, pour mieux entrer dans l'esthétique et la vie. Vous pouvez préciser ?
Eh bien Le cahier noir met en scène un adolescent masochiste, je crois que c'est très clair. C'est un adolescent qui se scarifie.
À l'origine, Le cahier noir n'est pas un texte dramatique. Comment avez-vous dirigé vos acteurs ?
La mise en scène n'a pas été différente. L'acteur n'est pas une marionnette. Je n'ai adapté qu'un cinquième du texte. Il n'y a pas de différence avec la mise en scène d'un texte dramatique. Il faut revenir au sens. La difficulté pour le personnage central est liée au rôle, qui demande une grande virtuosité de jeu. Je tenais à ce qu'on garde une légèreté. D'ailleurs, le public a ri.
Vous avez dit : ” Les metteurs en scène sont les femmes de ménage du sens.”, ou encore ” L'encre est l'ombre de tous les combats perdus.” Ces propos peuvent-ils faire écho à votre dernière mise en scène ?
Ah oui ? . . . J'ai dit ça ? Vous savez je dis beaucoup de choses. Oui, metteur en scène est un travail manuel. Il faut clarifier le sens sur scène. Mais pour être un grand créateur, il faut être sérieux sans esprit de sérieux. L'art n'est pas du sérieux. Mais il faut le faire avec sérieux.
Olivier Py, pour vous, c'est quoi le bon goût ?
Le bon goût ? Mais le bon goût c'est ce qu'on a quand on n'a plus rien !!! Je n'aime que l'exagéré, la folie, le débordement.
Propos recueillis par Zerbinette, qui expira après l'interview que voilà.