JEUDI 19 JUILLET
METEO : Temps saignant à tendance écumeuse. Quelques nuages acerbes menaçants. Pas d'accalmie avant l'apéro.
VU CE JOUR :
1. 36, AVENUE GEORGES MANDEL, Raymond Hoghe / Cloître des Célestins / IN
LE PITCH : Si tu l'ignorais, 36 Avenue Georges Mandel fut la dernière adresse de Maria Callas à Paris. Si tu l'ignorais également, Raimund Hoghe fut l'écrivain puis le dramaturge de Pina Bausch. L'objet de cette pièce était de rendre hommage à la Callas, la diva déchue qui acheva sa vie dans le dépouillement.
La description du spectacle tient en une phrase. Pendant une heure trente, Raimund Hoghe déambule. Et c'est tout. Parfois il enfile une paire de chaussures à talons. Et il marche. Parfois il change de chemise. Puis il marche. Parfois il s'allonge sous une couverture. Puis il marche. Parfois il change de pantalon. Puis il marche. Parfois il prend la pose. Puis il marche. Voilà. Ah non. J'oubliais. Le cadre du cloître des Célestins est divin. Et la voix de la Callas en bande son est une bénédiction.
MON SPEECH : Ce spectacle est ce que j'appelle une imposture. D'aucuns diraient plus sobrement qu'il interroge les limites du théâtre, mais comme tu le sais, Bongou n'est pas le temple de la langue de bois. Se servir de sa notoriété de fin de carrière et vendre un spectacle dans lequel on ne propose ni texte ni chorégraphie ni scénographie ni mime ni jeu d'aucune sorte doit sans doute être perçu comme une géniale bravade par l'intelligentsia à laquelle je n'appartiens pas. J'ai heureusement constaté aux applaudissements crispés en fin de pièce que le public avait globalement pris la mesure de ce spectaculaire foutage de gueule.
Dans le dossier de presse, j'ai pu lire ces mots de Hoghe : « La scène est un espace pour partager la beauté de cette musique . . . Je n'ajoute pas grand chose finalement. »
Je suis entièrement d'accord avec lui.
http://www.festival-avignon.com/fr/spectacles/2007/36-avenue-georges-mandel
2. UNE SAISON EN ENFER / Le K Samka / Théâtre des Halles : OFF
LE PITCH : Jean-Quentin Châtelain qui est un formidable comédien, est seul en scène dans la petite chapelle romane du théâtre des Halles. Petite jauge et lieu d'exception. Il est vêtu comme un roi du Nord dans Game of Thrones et se tient au milieu d'un cratère. Officiellement, ça s'appelle de la scéno épurée, ou minimaliste, selon ton humeur. Concrètement, ça ressemble à un cendrier géant fabriqué au rayon gravats de chez Casto. Il s'apprête à déclamer une des oeuvres les plus fulgurantes de Rimbaud : Une saison en enfer. Soit. Jusque là, j'y crois encore.
MON SPEECH : Le texte de Rimbaud, certes sublime, est suffisamment hermétique pour que l'on ait pas besoin d'en rajouter, côté opacité. Jean-Quentin Châtelain ouvre la bouche, et on ne comprend rien. Pendant une heure quinze. Et j'entends mon Rimbaud massacré par une diction refusant toute articulation. Le vers : « Comme le faisaient nos ancêtres au coin du feu » devient : « comléfégénozachétrocoinduffffff ». J'imagine qu'il est bien insolent de ma part d'attendre d'un comédien qu'il soit compréhensible. D'ailleurs, Télérama a décrété que l'acteur « Fait magnifiquement entendre le texte de Rimbaud. ». Je ne dois pas être encore assez snob. Amen.
http://www.theatredeshalles.com/pieces/une-saison-en-enfer/
3. VARIATIONS ÉNIGMATIQUES / Cie les Affamés / Théâtre des corps saints.
LE PITCH : Voici une pièce de théâtre tirée du roman d'Eric Emmanuel Schmitt. Un journaliste vient interroger un écrivain reclus sur une île perdue. Le début de l'histoire rappelle fortement le roman Hygiène de l'assassin de Nothomb. On y retrouve les mêmes topos, à savoir la confrontation entre l'artiste misanthrope et le journaliste enquêteur dont on se doute qu'il cache un secret. Dans ce huis-clos, les coups de théâtre se succèdent et l'effet de surprise est presque garanti. La pièce propose une réflexion sur ce qui fonde le couple, opposant l'amour à la passion. Sans être original, le sujet est desservi par une intrigue très bien ficelée.
MON SPEECH : J'ai mis du temps à entrer dans cette intrigue au démarrage plutôt convenu, mais les acteurs m'ont finalement émue. Le jeu est juste, sans ostentation, la mise en scène quoique sans surprise en cohérence avec le texte.
https://www.billetreduc.com/139793/evt.htm
ENTENDU SUR LE PAVÉ AVIGNONNAIS : « À Avignon, quand tu vois trois pièces, t'en vois une bien pour deux pourries. »
Zerbinette